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Intervention de Gilles Carrez

Réunion du 30 juin 2008 à 17h30
Règlement des comptes et rapport de gestion pour 2007 — Discussion après déclaration d'urgence d'un projet de loi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du plan :

On retrouve derrière cette croissance spontanée et intéressante des recettes un taux de croissance en fin de compte pas si mauvais puisqu'il a été de 2,2 %.

Enfin, le déficit prévu par la loi de finances initiales pour 2007 se trouve, en exécution, inférieur de 3,5 milliards d'euros.

Au-delà de ces éléments favorables, je pense qu'il faut malgré tout rester lucide et dire les choses telles qu'elles sont.

Tout d'abord, par rapport à l'année 2006, en exécution – qui compte plus que la prévision –, le déficit de l'État est malheureusement reparti à la hausse puisqu'il aura augmenté de 2,7 milliards d'euros à périmètre constant.

En ce qui concerne l'excédent primaire, notion à laquelle j'attache la plus grande importance, qui permet de mesurer la dette en faisant table rase du passé, c'est-à-dire en mettant de côté les intérêts de la dette, nous sommes en équilibre pour l'année 2007, toutefois avec un excédent très léger de 900 millions d'euros, très inférieur à celui dont nous avons bénéficié en 2006 et qui atteignait 2,7 milliards d'euros.

L'accroissement de la dette publique entre le 31 décembre 2006 et le 31 décembre 2007 constitue un dernier motif de préoccupation. Nous sommes ainsi passés, pour l'ensemble de la dette publique toutes administrations confondues – État, sécurité sociale, collectivités locales –, de 63,6 % à 63,9 % du PIB.

Il s'agissait, à travers ces exemples, de vous montrer à quel point nos finances publiques restent dans une situation de grande fragilité.

Quels enseignements tirer des instruments de la LOLF ?

En ce qui concerne les effectifs, les plafonds d'emplois, qui ont été surdimensionnés – mais nous sommes au début de la mise en oeuvre de la LOLF –, n'ont pas été atteints. Aussi, par rapport aux plafonds d'emplois, fixés par chaque ministère, on a enregistré une diminution par rapport à 2006 de 25 000 unités. Ce chiffre n'est toutefois pas significatif. En revanche, on notera pour les emplois effectivement utilisés, si on les mesure en emplois temps plein travaillés, une diminution entre 2006 et 2007 de 15 000 emplois, conforme ici à la prévision. Je rappelle que pour 2008 l'objectif est de l'ordre de 18 000.

Il est frappant de constater que la fongibilité dite asymétrique, c'est-à-dire la possibilité pour les gestionnaires de programmes d'utiliser des crédits de personnels dont ils n'auraient pas besoin pour d'autres types de dépenses comme les dépenses informatiques ou d'amélioration des conditions de travail, ont diminué en 2007 par rapport à 2006. Il conviendra, monsieur le ministre, d'examiner cette situation de plus près car c'est un principe très intéressant du point de vue du management public. Deux ou trois années sont nécessaires pour calibrer exactement le nombre d'emplois et les masses salariales, mais, ensuite, il faut qu'il y ait, entre la maison Bercy et les gestionnaires de programmes une vraie relation de confiance pour faire jouer cette fongibilité dite asymétrique.

S'agissant des dépenses, je le disais il y a un instant, nous avons vraiment tenu, complètement, la norme de dépenses, mais de dépenses stricto sensu. En effet, nous constatons une diminution en volume – je dis bien : en volume – de 0,7 point. Les dépenses ont augmenté moins vite que l'inflation. Je rends hommage au Gouvernement, qui a exécuté, en dépenses, exactement l'enveloppe que nous avions votée à la fin de l'année 2006 au titre des prévisions 2007.

Durant toute l'année 2007, la gestion infra-annuelle qui a permis cette excellente performance est passée, d'une part, par l'absorption des crédits de reports – 4 milliards d'euros, un montant qui était déjà très réduit par rapport aux années précédentes –, et d'autre part, par une régulation budgétaire qui a été très raisonnable.

Je tiens à le signaler ici, parce que l'on dit souvent que la régulation budgétaire remet en cause les crédits qui ont été votés. Pas du tout. Il faut que vous sachiez que sur les 5 milliards et quelques de crédits qui avaient été mis en réserve, les trois quarts ont été rendus, en cours d'année, aux gestionnaires. Et il n'y a eu d'annulations de crédits que pour permettre des redéploiements. On a annulé 3 ou 4 milliards de crédits pour permettre des abondements de crédits sur des programmes ou des missions qui n'étaient pas suffisamment dotés. Donc, une gestion infra-annuelle tout à fait satisfaisante.

Je voudrais maintenant en venir aux recettes. Et c'est là que je veux faire passer un message de grande préoccupation. Vous allez tout de suite comprendre pourquoi.

D'exécution à exécution, les recettes, fiscales et non fiscales, ont progressé de plus de 20 milliards d'euros entre 2006 et 2007 : 20 milliards d'euros de progression spontanée. On fait donc l'hypothèse suivante : à structure fiscale constante, les recettes ont progressé de 20 milliards d'euros. D'où la question : qu'avons-nous fait, en 2007, de ces 20 milliards d'euros de recettes spontanées supplémentaires ? Ces 20 milliards, ce sont 16 milliards de recettes fiscales, et entre 3 et 4 milliards de recettes non-fiscales. Qu'en avons-nous fait ?

Eh bien, elles sont allées : à hauteur de 12 milliards, à la baisse des impôts ; à hauteur de 1,7 milliard, à la compensation de la baisse des cotisations sociales ; pour un montant de 5,5 milliards à des augmentations de dépenses, du budget lui-même ou des transferts sur des opérateurs ; et seulement pour 1 milliard à la baisse du déficit. Sur 20 milliards de recettes supplémentaires, seulement 1 milliard d'euros sont allés à la baisse du déficit !

Cela est extrêmement préoccupant. En effet, aujourd'hui, nous sommes confrontés à la situation suivante. Sur les dépenses, je viens de le dire, peu à peu, après quelques années de bonne régulation, de respect de la norme du zéro volume, tout est à peu près rentré dans l'ordre, on sait où l'on va. Mais le dilemme devant lequel nous sommes peut être formulé ainsi : protection de nos recettes versus déficit. La croissance de nos recettes doit-elle aller d'abord aux baisses d'impôt ou d'abord à la baisse du déficit ? Cela fait maintenant plusieurs années que je dis que la priorité absolue doit être celle de la baisse du déficit.

Nous sommes allés, jeudi dernier, Didier Migaud et moi, à Berlin pour rencontrer nos collègues de la commission des finances du Bundestag. Le président de cette commission était accompagné de représentants de tous les partis politiques. Cette réunion a été très intéressante. Nos collègues allemands nous ont dit très clairement qu'ils avaient fait de la réduction du déficit leur priorité absolue. Nous avions un gros problème, nous ont-ils dit, celui des dépenses fiscales – dont je rappelle qu'elles augmentent aujourd'hui trois à quatre fois plus vite que les crédits normaux –, et ce problème, depuis quelques années, nous nous y attelons. Et peu à peu, ont-ils ajouté, nous sommes en train de faire rentrer les dépenses fiscales dans le moule,…

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